Savoir les endroits que je recommande toujours quand on me demande : Où dormir à Nyons ? Que faire ? Où manger ? écrit moi ICI contact@vivreanyons.fr
Me suivre sur https://www.facebook.com/groups/nyonsaujourdhui
si tu avais connu Nyons dans ces années-là, tu aurais senti l’odeur avant même d’arriver au Pont Roman. Je te parle d’une époque où la ville ne vivait pas seulement d’olive de Nyons, de marché provençal, de balades dans les ruelles du vieux Nyons, ou de ce vent du Pontias qui réveille mieux qu’un café. Non, non. Ici, on avait aussi nos deux monstres sacrés du sucre : Roullet et POP (Produits Dauphiné Provence). Deux confitureries qui ont tourné pendant presque trois quarts de siècle et qui ont donné du travail à plus de monde qu’il n'y a de parasols un jeudi d’été au marché.
Tout commence juste après la Première Guerre mondiale. 1918. Nyons est encore un petit bled tranquille : quelques commerces, quelques moulins à huile, et des Nyonsais qui vivaient déjà dehors comme si le soleil leur appartenait. C’est là que la famille Roullet, pépère dans sa maison avenue Paul Laurens, se met à bricoler des conserves maison : tomates, truffes on ne juge pas, chacun son truc. Et pendant ce temps, la famille Micollet, aidée de la banque Delhomme, lance POP du côté des Vivandes, avec dans l’idée de conserver les fruits, les légumes, l’huile d’olive, bref… tout ce qui pousse ou se ramasse dans la vallée.
Mais attention : très vite, ces deux petites affaires deviennent de vraies manufactures. Les années 20-30, ça file droit. Roullet construit son premier grand bâtiment route de Montélimar en 1926. À l’époque, les gens du coin disaient : « Mais pourquoi ils construisent si loin ?! Les ouvriers vont jamais marcher jusque-là ! ». On en rigole aujourd’hui quand on voit que la ville s’est étalée autour comme une pâte de coing oubliée au soleil.
POP, de son côté, commence à fabriquer des pâtes de fruits dès 1934, mais aussi des petits pots de confiture individuels. À croire que Nyons voulait nourrir toute la France en goûters. Pendant la guerre, quand le sucre manquait, on invente même la confiture au sucre de raisin. Les anciens t’expliqueront, mais disons qu’il fallait être motivé pour en reprendre deux fois.
Et puis, arrives les années 1950-1970, l’âge d’or, le vrai. Nyons sent la confiture chaude dès 6 heures du matin, les camions gazogènes défilent, les ouvriers sortent de partout. Les deux usines emploient plus de 200 personnes en pleine saison. Rien que chez Roullet, on monte jusqu’à 800 tonnes de pâtes de fruits par an. Tu te rends compte ? 800 tonnes ! De quoi remplir la rivière Eygues d’un bout à l’autre.
Pendant ce temps, Nyons change de visage : des familles s’installent, les commerces prospèrent, on construit des entrepôts, des bureaux, et même des salles montées sur l’ancien réservoir d’eau de la SNCF. C’est la période où Nyons commence à devenir ce qu’on raconte aujourd’hui sur vivreanyons.fr : une petite ville ensoleillée, animée, où il se passe toujours quelque chose, entre le quartier des Forts, la Place Buffaven, les cafés du centre, les artisans, et les gamins qui descendent en vélo depuis la Tour Randonne.
Mais comme souvent dans les belles histoires arrive la fin. Les supermarchés débarquent, les prix deviennent serrés comme un jeudi au parking, les barres chocolatées envahissent les cours de récré, les pâtes de fruits deviennent “désuètes” (comme disent les Parisiens). Les coûts montent, les salaires aussi, et les petites usines familiales peinent à suivre. POP réduit, Roullet se fait racheter, puis délocaliser dans les années 90, direction la région bordelaise. Et Nyons, qui vivait au rythme des chaudrons de pulpe, se retrouve soudain silencieuse.
Aujourd’hui, il ne reste plus que les bâtiments : des géants endormis, des témoins d’une époque où Nyons ne sentait pas seulement l’olive noire, mais aussi l’abricot, la prune, la poire Williams et la gelée de coing. On passe devant, on regarde, on se dit : « Ah si les murs pouvaient parler, ils nous raconteraient des milliers de pots. »
Moi, chaque fois que je passe là-bas, je revois les camions, les ouvriers qui rigolaient à la pause, les gamins qui piquaient des chutes de pâtes de fruits en douce, et toute cette vie. Et ça me donne envie de raconter encore et encore cette histoire sur vivreanyons.fr, pour que les jeunes et les touristes qui débarquent par wagons pas à la gare !!! l’été sachent qu’avant Instagram et les selfies sous le Pont Roman, c’est la confiture qui faisait tourner la ville.