Sahune : un village, deux âmes… et tout un monde entre les deux
Ah mon petit, si tu passes dans le coin de la Drôme, y’a un endroit que je t’conseille de pas rater, c’est Sahune. Tu connais pas ? C’est normal, c’est pas le genre de village à faire la une des magazines, mais crois-moi, c’est une perle. Une perle à deux facettes, même. Et moi, Chris de Nyons depuis belle lurette, j’vais t’en causer comme si on était assis sur un banc, à l’ombre d’un tilleul, à regarder passer les saisons.
Sahune, c’est pas un village comme les autres. C’est un coin avec deux cœurs qui battent. Le premier, c’est le vieux village, là-haut sur la colline, accroché à flanc de montagne comme un nid d’aigle. L’autre, c’est le bourg moderne, plus bas, le long de la rivière, où vivent aujourd’hui les Sahunois. Entre les deux, y’a un pont, du temps qui passe… et tout un bout d’histoire.
Moi, quand je monte là-haut, j’te cache pas que j’ai la gorge un peu serrée. Parce que ce vieux village, il a été abandonné au XIXe siècle. Trop froid, trop haut, pas assez de soleil. Les gens sont descendus s’installer en bas, dans la vallée, le long de la route et de l’Eygues. Mais là-haut, ils ont laissé leurs pierres, leurs souvenirs, leurs maisons aux ruelles étroites et aux fenêtres ouvertes sur le vide. Heureusement, depuis des années, des bénévoles s’en occupent. Une association s’est formée pour défricher, restaurer, faire revivre ce bout de mémoire. Un sacré boulot. Rien que pour ça, faut y aller.
Tu verras, y’a l’ancienne église paroissiale, du XVIIe, avec encore son clocher qui tient debout malgré les siècles. Un peu plus loin, on tombe sur les ruines du château féodal et de la chapelle castrale Saint-Michel, du XIIIe. C’est du privé maintenant, mais rien que de les voir de l’extérieur, t’as l’impression d’entendre les pas des seigneurs d’antan. Et puis, à chaque coin, t’as des vestiges d’ateliers de cordonniers, des murs en pierre sèche, des bouts de vie figés. C’est pas une carte postale, c’est du vrai.
Y’a même un sentier botanique, créé en 2013, qui t’emmène à travers la garrigue. T’y croises des plantes locales, des herbes qui sentent bon, et au bout, t’as une vue… ah mon gars, une vue sur la vallée à t’couper le souffle ! Tu vois jusqu’au Ventoux par temps clair. Et si tu pousses jusqu’à la table d’orientation et l’ancien cimetière protestant, t’auras vraiment fait le tour du haut.
Maintenant, redescendons vers le village moderne. Tout en longueur, face au sud, il suit la RD 94 comme un lézard au soleil. C’est là que ça vit, que ça bouge, que les gens causent. Y’a l’église Saint-Michel-et-Saint-Georges, construite en 1931. Si t’aimes l’Art Déco, regarde ses vitraux, ils sont magnifiques.
Ce que j’aime à Sahune, c’est que c’est un village d’artistes. Des potiers, des céramistes, un ébéniste d’art – Nicholas Bentley, il s’appelle, installé en face de la station-service. Et puis y’a Marie-Christine Louvet, plasticienne, qui fait des épouvantails rigolos. Tu te balades, tu crois voir quelqu’un au loin, et paf, c’est une de ses créations. Un peu de poésie dans le quotidien, ça fait du bien.
Et côté gourmandises, t’es servi. Sahune, c’est la terre de l’abricot. Y’a une variété locale, l’Orangé de Provence, qu’on appelait autrefois le Polonais. Une petite boule sucrée, juteuse, orange clair, qui pousse ici comme nulle part ailleurs. En juillet, t’en trouves plein les cagettes chez les producteurs. Et puis y’a la Tanche, cette fameuse olive noire de Nyons, qui pousse aussi sur les terres de Sahune. Elle donne une huile AOC à tomber par terre. Rajoute les cerises, les raisins, les vignes bio… c’est un petit paradis agricole.
Les amateurs de plein air sont gâtés : randonnées pédestres, équestres, VTT, y’a une bonne dizaine de sentiers qui partent du village. L’un des plus célèbres grimpe au Bramard, ce rocher en forme de sphinx qui domine la vallée. Si t’as les jambes pour, vas-y, ça vaut le détour. En haut, la vue est digne des Alpes, avec parfois le Mont Ventoux en toile de fond.
Et si t’aimes le parapente, t’es dans une des zones les plus réputées des Baronnies Provençales. Des pros proposent même des vols en tandem, pour voir tout ça de là-haut. Et pour les jours chauds, pas de panique : tu peux piquer une tête dans l’Eygues ou profiter du parc aquatique à Nyons, à 15 bornes de là.
Faut pas oublier que Sahune fait partie du Parc naturel régional des Baronnies Provençales. Les bureaux du parc sont même installés dans le village, à la mairie. Et bientôt, y’aura une vraie maison du parc, flambant neuve, écolo comme il faut, à l’entrée ouest du bourg. Un beau projet qui met encore un peu plus en valeur ce territoire unique.
Alors voilà, mon p’tit. Sahune, c’est pas qu’un village, c’est une histoire vivante, un coin de Drôme profonde, où l’on sent encore battre le cœur des anciens et pousser les rêves des vivants. Monte là-haut, prends un peu de hauteur, cause avec les gens. Et surtout, prends ton temps… Parce que chez nous, on dit toujours : "plus t'marches doucement, plus tu vois les belles choses".